Les réalisateurs abordant un sujet précis ( historique dans ce cas) et peu abordé arrivent à fasciner les spectateurs, Morten Tyldum fait partie d’eux.
Un hommage à Turing?
Imitation Game relate la véritable histoire d’Alan Turing, le cryptologue qui a réussi à mettre au point le codage pour « craquer » la machine Enigma.
Peu connu des bancs de l’école, cette partie historique ne nous vient pas automatiquement lorsqu’on parle de la Seconde Guerre Mondiale et Tyldum nous en fait un extrait fortement inspiré et efficace.
Joué par Benedict Cumberbatch connu précédemment pour son excellente interprétation de Stephen Hawking en 2004 ou encore de Sherlock dans Sherlock Holmes, Benedict nous offre ici une performance plus nuancée. En effet, si son le jeu est très bien maîtrisé, il en est moins de la caricature du génie dont il fait parfois preuve à certain moment du film, le jeune surdoué qui s’exclue volontairement en montrant un dédain quasi détestable. Il est, certes, assez fréquent de voir dans de nombreux films le génie très isolé, ayant une folie géniale, une attitude atypique. Cependant, c’est en cela que Tyldum commence à s’éloigner des faits, puisque Turing n’était pas ce personnage totalement exclus et misanthrope comme on peut le voir le premier quart du film.
Cependant, les acteurs qui le secondent sont très brillants et remontent l’interprétation générale du film. En effet, Keira Knightley, que l’on a pu voir dans orgueil et préjugés ou encore au côtés de Johnny Depp dans Pirate des Caraïbes, nous offre ici une excellente prestation, nuancée et travaillée. Puis, j’ai tout particulièrement aimé l’interprétation d’Allen Leech qui prend un place très importante au long du film. Pour éviter les spoilers à ceux qui n’aurait pas encore vu le film, je tairais son rôle !
Quand l’émotion prime sur les faits historiques
Divertissant, intéressant, mais au-delà, on peut y voir des aspects plus ou moins favorables.
Dans une première partie nous avons cette fresque historique qui fascine et rend le spectateur véritablement attentif et passionné. La mise en scène sur le déroulement du projet mathématique et scientifique pour lutter contre l’ennemi force le respect bien que nous avons très peu d’information sur le concept même de la machine. En effet, ce qui aurait dû être un élément clé du film a été laissé de côté au profit d’une partie plus axée sur l’émotion.
Cette émotion va prendre une ampleur telle qu’elle va définir la deuxième partie du film. Mortem Tyldum aurait dû creuser pour amener le spectateur à être surpris, il prend soudainement une autre direction.
Un Turing romancé, une histoire révisée
L’aspect émotionnel du film avait pourtant sa place notamment pour mettre en avant la phase du procès de Turing qui donne une dimension attachante au personnage et à ses associés.
Effectivement, Tyldum focalise toute l’autre moitié du film sur l’homosexualité d’Alan Turing. Il apporte une analyse personnelle sur son attitude, ses agissements, son environnement qui fait presque oublier qu’il s’agit d’un film traitant d’un passage majeur de la seconde guerre mondiale. Cependant, le fait que Tyldum ait volontairement fait passer Turing pour un homosexuel qui se cache et se refuse sonne faux dans cette reconstitution historique ; oui Turing n’a jamais nié son homosexualité mais au-delà de ça il la vivait ouvertement. C’est justement ce qui ne colle pas avec le cambriolage du début du film dont la situation avait suffisamment d’intérêt pour axer le trait du personnage dans cette optique de gay non refoulé.
Finalement, ce qui aurait pu rester secondaire prend la place majeure du film. Imitation Game, une œuvre qui se veut à la fois historique et moraliste. Chose possible, mais ici on remarque clairement la rupture ce qui donne un effet de lenteur et perd le spectateur qui en sait plus tellement où le réalisateur veut en venir.
Il n’en reste cependant pas un mauvais film bien au contraire, divertissant et documenté, il en va du spectateur d’apprécier la touche personnelle que le réalisateur a voulu donner au film.