Le Canadien Kent Monkman présente sa dernière exposition solo « Honte et préjugés : une histoire de résilience » au Musée McCord, jusqu’au 5 mai 2019. Cette exposition instructive et bouleversante change la perspective de l’histoire du Canada en y replaçant le vécu douloureux des peuples autochtones, grâce aux peintures et installations de cet artiste inclassable.
Kent Monkman : un artiste à (re) découvrir absolument
J’ai découvert Kent Monkman au Musée des beaux-arts de Montréal, lors d’une visite guidée où 3 de ses tableaux monumentaux m’avait été décortiqués. Quel style unique, quel humour féroce, quel talent pictural! J’ai sauté sur l’occasion de parcourir sa dernière exposition au Musée McCord, pour m’imprégner à nouveau de son travail.
Ce que j’aime chez cet artiste, c’est une combinaison d’aspects que je n’ai jamais retrouvée à ce jour :
- Son style de peinture, figuratif — J’ai un penchant pour les œuvres de cette catégorie. M’essayant moi-même au dessin et à la peinture, je ne peux qu’admirer son talent, son travail et la précision de son coup de pinceau.
- Ses messages — Kent Monkman est sans conteste un artiste engagé. À travers ses œuvres, il milite pour la défense des droits des peuples autochtones (il est de descendance crie et Irlandaise) et les identités sexuelles plurielles.
- Son humour — Kent Monkman s’est créé un alter ego flamboyant, Miss Chief Eagle Testickle (devant les Pères de la Confédération, sur l’œuvre The Daddies, sur l’affiche en tête d’article). Il s’invite souvent dans ses œuvres pour nous offrir une perspective différente sur les conventions et l’histoire avec un grand H. La dérision, qui tire parfois vers le kitsch, permet à l’artiste de secouer beaucoup de nos idées reçues.
- Son amour des grands maîtres et de l’histoire de l’art – Il s’inscrit inévitablement dans une lignée de grands peintres classiques qu’il admire (le Caravage, Raphaël et bien d’autres), dont il s’inspire parfois très directement dans ses œuvres.
Faire entrer les peuples autochtones dans l’histoire de l’art
« Honte et préjugés : une histoire de résilience » est une exposition commandée à l’origine par le musée d’art de l’université de Toronto dans le cadre de Canada 150. Et voici l’objectif principal de l’artiste :
Ma mission est de faire entrer l’expérience autochtone dans le canon de cette histoire de l’art, qui, jusqu’à maintenant, nous a effacés.
– Kent Monkman
Fort du constat qu’il n’existait que des œuvres vantant l’expansion des colons européens, Kent Monkman a créé une série de peintures et d’installations retraçant l’histoire du Canada, du point de vue des peuples autochtones.
Il nous propose donc un voyage à travers le temps au bras de Miss Chief Eagle Testickle. Le parcours chronologique de l’exposition se décompose en 9 sections, allant de La Nouvelle-France jusqu’aux réserves que nous connaissons aujourd’hui. On y fait face notamment à la période des pensionnats autochtones, dont la douleur est traduite dans cette toile à la puissance évocatrice incroyable, intitulée Le Cri.
Par ce travail colossal, étayé de nombreux artefacts des collections Cultures autochtones et Arts décoratifs du Musée McCord, Kent Monkman souhaite également célébrer la grande résilience des peuples autochtones et leur capacité à transcender ce passé douloureux par la création artistique.
Je suis sortie bouleversée de cette exposition, à laquelle on ne peut rester indifférent. Je vous invite donc à pousser les portes du Musée McCord dans les prochaines semaines pour la découvrir.
« Honte et préjugés : une histoire de résilience »
jusqu’au 5 mai 2019
Musée McCord
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