Salle de nouvelles : médias, mensonges et réflexions

Jeudi 7 septembre, j’ai assistĂ© Ă  la premiĂšre mĂ©diatique de la piĂšce « Salle de nouvelles » au thĂ©Ăątre Duceppe Ă  MontrĂ©al. Cette comĂ©die noire, adaptation scĂ©nique de Lee Hall du film « Network » (1976), est une satire du monde des mĂ©dias, plus prĂ©cisĂ©ment la tĂ©lĂ©vision, et surtout de l’émergence de l’information-spectacle ou ce qu’on appelle dans les internet le clickbait.

Crédit photo Danny Taillon

Mise en contexte 

AprĂšs 25 ans de loyaux services, le cĂ©lĂšbre prĂ©sentateur de la chaĂźne UBS, Howard Beale apprend qu’il prendra sa retraite anticipĂ©e en raison de ses cotes d’écoute en dĂ©clin.

Pour sa supposĂ©e derniĂšre apparition et dans un geste dĂ©sespĂ©rĂ©, il se lance dans un discours enflammĂ©, annonçant qu’il se suicidera en direct le mardi suivant.
Son franc-parler plait au public et les cotes d’écoute explosent. Ceci change la donne pour les employeurs de Beale, le voyant comme un nouveau prophĂšte enragĂ©. En changeant la vocation de l’émission de Beale, on mise tout, donc, sur la nouvelle formule pour booster les cotes d’écoute de la chaĂźne et retrouver ainsi le chemin de la rentabilitĂ©.

La piĂšce

Dans le rĂŽle principal de Howard Beale, le lecteur de nouvelles, on retrouve Denis Bernard Ă  la prĂ©sence scĂ©nique Ă©poustouflante et au charisme indĂ©niable. Sa performance est d’autant plus impressionnante, car il joue pour les camĂ©ras qui le filment sur scĂšne et pour le public de la salle. Sa prestation est le vĂ©ritable pilier de cette piĂšce qui a Ă©tĂ© prĂ©sentĂ©e auparavant (2021) au thĂ©Ăątre Le Trident Ă  QuĂ©bec. Autour de lui, onze autres comĂ©diens, le tout bien orchestrĂ© comme des abeilles dans une ruche.

Denis Bernard dans le rĂŽle d’Howard Beale – CrĂ©dit photo Danny Taillon

Les médias et leur rÎle dans notre société moderne

« Salle de nouvelles » est une exploration et une critique incisive et sans dĂ©tour de l’évolution des mĂ©dias modernes et leur enlisement dans le sensationnalisme au dĂ©triment de la vĂ©ritĂ© et de la qualitĂ© de l’information.

On assiste donc Ă  l’exploitation de sentiments Ă©voquant la peur et la colĂšre pour augmenter les cotes d’écoute. C’est ainsi qu’on profite du questionnement d’Howard et son mal-ĂȘtre pour aller chercher plus de couverture mĂ©diatique et de part de marchĂ©s, mĂȘme si son dĂ©sarroi cause la dĂ©gradation de sa santĂ© mentale.
Mais qu’importe ! Pour les gens qui travaillent dans l’industrie, les chiffres sont ce qui compte et la fin justifie les moyens.
D’autre part, on ne peut s’empĂȘcher de faire le parallĂšle avec les nouveaux mĂ©dias et les rĂ©seaux sociaux de ce monde ainsi que leur rĂŽle dans notre sociĂ©tĂ© moderne. La poursuite d’audiences, de clics, de parts de marchĂ© ou de lecteurs, est la quĂȘte (ou obsession ?) quotidienne de ces mĂ©dias, nouveaux ou anciens.
Dans une Ăšre oĂč plusieurs les considĂšrent comme source de vĂ©ritĂ©, « Salle de nouvelles » nous rappelle que « La tĂ©lĂ©vision ne dĂ©tient pas la vĂ©ritĂ©, c’est un parc d’attractions, un cirque. On vous dit ce que vous voulez entendre. »

Crédit photo Danny Taillon

Ce que j’en ai pensĂ©

« Salle de nouvelles » est sans contredis une piĂšce divertissante, mais en mĂȘme temps qui incite Ă  la rĂ©flexion. Personnellement, j’aime beaucoup quand l’art est utilisĂ© comme moyen pour provoquer, pour nous bousculer et nous pousser Ă  remettre en   question certains de nos paradigmes sociĂ©taux.

Un spectacle captivant et une satire percutante Ă  ne pas manquer au thĂ©Ăątre Duceppe jusqu’au 7 octobre.


Salle de nouvelles 
Mise en scĂšne : Marie-JosĂ©e Bastien
Traduction : David Laurin
Billet : https://duceppe.com/

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